All sorts of jazz, free jazz and improv. Never for money, always for love.
En ce moment, faute de temps, j’écris peu. Et je le regrette sincèrement car nombreux sont les albums dont j’aimerais parler. Parmi eux, il y a ce Some Other Zongs de Daunik Lazro, paru sur le label Ayler Records. Cet album donne suite au Zong Book que le saxophoniste avait gravé il y a une dizaine d’années pour le label Emouvance. Je trouve amusant, au passage, la facilité avec laquelle un projet en continuum passe d’un label à un autre, et remarquable le fait que tout cela se fasse en bonne intelligence. Peut-être un de ces quatre aurai-je le loisir de chercher à en savoir plus!... Toujours est-il que c’est avec beaucoup de plaisir que l’on retrouve, en solo, ce grand Monsieur de la musique improvisée, celle qui n’a pas froid aux yeux, cette musique parfois radicale dont l’aridité de surface dissimule des territoires insoupçonnés. Proposer un disque de saxophone baryton solo est déjà un défi en soi, mais cette petite pépite est un témoignage précieux d’une prise de risque encore plus impressionnante, celle de créer, en live, sans filet, un petit monde étrange où les notes ne s’alignent pas linéairement pour créer une mélodie, mais s’installent, se distordent, se superposent en une polyphonie au sein de laquelle les sons se mêlent, s’épousent, se détachent, se rejettent parfois. Pourtant, au début du disque est proposée une interprétation assez mélodique de la composition « Vieux Carré » de Joe Mc Phee, lui aussi passé maître dans l’art difficile du solo de saxophone (et dont il faut réécouter le magnifique album Falling Angels paru chez Hat Hut), qui voit le discours de Daunik Lazro prendre le chemin d’une abstraction qui s’installera peu à peu dans l’album, jusqu’à en devenir la moelle. Car dès le second titre, « Caverne de Platon », le langage est bouillonnant, sorte de magma d’où s’échappent des fragments de phrases, des rugissements et des cris. Des graves les plus profonds aux suraigus déchirants, la tessiture du grand saxophone est exploitée dans sa globalité, mais sert une musique relativement statique, ou plutôt verticale, dont la dimension méditative se voit renforcée par la réverbération naturelle de l’église Saint-Merry, dans laquelle ont été captés la quatre derniers titres du disque, les « Zong at Saint-Merry ».
Some Other Zongs n’est sûrement pas le disque le plus simple à écouter. Mais pour peu que l’on prenne le temps de se laisser emporter par son univers, il nous offre une occasion unique de voyager à l’intérieur du son, au plus profond du discours d’un artiste qui a passé beaucoup de temps à déblayer de nouveaux chemins et qui continue de le faire, avec un talent et une intégrité qui forcent le respect.
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