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Marc Ducret - Tower, vol.2

Vincent Cotro, Jazz Magazine

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Il a déjà été évoqué ce que le projet « Tower » doit à l'inspiration fournie à Marc Ducret par un roman de Vladimir Nabokov. Un bref chapitre d'Ada ou l'Ardeur (1969), dans lequel « l'écriture dessine un labyrinthe complexe fait de miroirs, de retours et de correspondances qui finit par engendrer une forme fixe dans sa réalisation », a conduit à la constitution de trois orchestres différents, occupés au jeu de la réminiscence, de la variation et du commentaire à partir d'un répertoire spécialement conçu pour ce projet. L’idée est fascinante en elle-même, comme a pu l’être la première réalisation confiée à un quintette franco-danois. Trois vastes pièces composent le second étage de cette tour, un entrelacs de lignes baignant dans le mystère perpétuellement entretenu chez l’auditeur entre la mémoire et la découverte. La puissance qui émane du jeu s’alimente aux sources d’une complicité rayonnante entre les quatre tisserands de cette extraordinaire toile sonore. Du travail des boucles à celui de la salissure, en passant par l’exploration de toutes les configurations (quatre, trois et un, deux à deux…), les fondements d’une œuvre majeure – dont la saisie et le décryptage des mécanismes fins s’imposera le moment venu comme un enjeu essentiel – s’entendent ici, et c’est important, sans qu’il soit besoin de la replacer dans son contexte/prétexte littéraire ni de relier chaque partie au tout. L’énergie impulsée à la forme, le travail des timbres, la liberté laissée à chaque membre d’évoluer dans un tout organique participent d’un plaisir immédiat et accessible… qu’une écoute fine et exigeante saura faire culminer. Ecoutons pour nous en convaincre la poésie du contraste et le retournement de la matière qui nous surprend vers la dixième minute de Softly Her Tower Crumbled in the Sweet Silent Sun. Et saluons comme il se doit la qualité de la production en appréciant comment les deux jaquettes se répondent et s’imbriquent à l’image des deux réalisations de ce work in progress dont la poursuite se fait déjà furieusement attendre.