All sorts of jazz, free jazz and improv. Never for money, always for love.
Suite aux coupes sombres dans le budget de la culture, les difficultés financières qui touchent le monde du jazz poussent les musiciens à sortir des sentiers battus pour intégrer des influences qu'ils se sont longtemps interdites. Les étiquettes imposées par le marketing disparaissent avec les grandes surfaces culturelles qui avaient parqué chacun dans sa petite boîte. Mais d'un revers de fortune peut naître une idée nouvelle. La compositrice-bassiste-chanteuse-arrangeuse Sarah Murcia n'avait pas attendu. Dès 2001, avec son groupe Caroline, elle fait ses choux gras de la pop et du rock. Never Mind The Future, probablement son meilleur album, est un cover de Never Mind the Bollocks, Here's the Sex Pistols, seul disque studio des Sex Pistols, précurseurs du punk rock.
En invitant le pianiste Benoît Delbecq et le chanteur-chorégraphe Mark Tompkins à rejoindre le groupe Caroline, Murcia a eu une sacrée bonne idée. D'abord on entend le pianiste jouer franchement sans s'encombrer des subtiles pianissimi qui le caractérisent d'habitude, amplifiant ici mélodiquement la section rythmique. Ensuite la reconversion vocale de l'extraordinaire danseur Mark Tompkins est une excellente nouvelle pour lui comme pour nous ; avec les années les cordes vocales gardent une souplesse à laquelle le corps ne peut prétendre. Le guitariste Gilles Coronado et le batteur Franck Vaillant sont les piliers rock de l'orchestre tandis que le saxophoniste Olivier Py et la contrebassiste lui donnent une liberté plus jazzy. L'arrivée de Delbecq gomme les dernières raideurs qui m'avaient parfois retenu dans le passé. Les explosions de colère des uns et des autres font gicler les notes par grosses grappes. La voix du crooner lorgne du côté de Lou Reed et le ton très british de l'ensemble me fait penser au groupe Rip Rig + Panic, héritiers post-punk tirant vers le free jazz. Me voilà en train de récupérer des étiquettes qui s'étaient pourtant décollées, grrr ! Un treizième morceau, exogène, arrive en épilogue, intéressante reprise de My way, manière de revendiquer sa vision personnelle du futur devenu, depuis, notre présent.
Car Never Mind The Future est un projet suffisamment intemporel pour que l'on s'en échappe. Il montre tout de même que No Future n'est pas l'apanage d'une époque, mais l'expression d'un désespoir qui touche la jeunesse d'aujourd'hui comme celle de la fin des années 70. La médiocrité de la classe moyenne est égale à elle-même. Les textes des chansons attaquent la monarchie britannique, évoquent l'anarchie ou l'avortement en termes crus que la musique développe sans anachronisme. Murcia a compris que le futur était une vue de l'esprit et qu'il faut avoir les pieds sur Terre, ici et maintenant, pour résister et se donner les moyens de ses rêves.
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