All sorts of jazz, free jazz and improv. Never for money, always for love.
A l’écoute de l’album studio Electricity, sorti il y a deux ans à peine sur le label Ayler Records, tout portait à croire que chez l’Humanization 4tet, groupe du guitariste lusitanien Luís Lopes, l’urgence mâtinée de tension pouvait libérer toute son énergie sur scène. La pochette de ce Live In Madison ne laisse guère de doutes : l’attitude survoltée du public, comme hypnotisé par une décharge de tension, en dit plus long que n’importe quel commentaire.
Le quartet ouvre ce disque avec un inédit. Au premier abord, cette version de « Bush Baby » diffère grandement de l’originale, par le saxophoniste Arthur Blythe. Bien sûr, ce vénérable comparse de Gil Evans n’avait pas prévu la sauvagerie anguleuse du ténor de Rodrigo Amado, qui se fracasse sur la masse polyrythmique de la batterie de Stefan González. Mais l’ostinato lancinant de Lopes, qui se délite sous les coups de boutoir du saxophone, laisse entrevoir une mécanique plus subtile. Au fil des morceaux, issus du premier album, sorti en 2008 chez Clean Feed, et d’Electricity, on sent que la contrebasse languide mais tonique d’Aaron González ménage l’espace nécessaire pour que sur « Long March For Frida Kalho », par exemple, le rapport de force ne devienne pas ici l’axe central. Car Live In Madison n’est pas que bruit et fureur ; point de cérémonie vaguement punk où l’on démonterait du jazz à grand coup de watts. Au contraire, les brisures électriques surgies de ces « Jungle Gymnastics » échevelées construisent un bolide atypique et rutilant, aussi minutieux qu’inéluctable.
Il serait trop simple en effet de résumer le propos d’Humanization 4tet à une frénétique confrontation. Il n’y a pas, d’un côté, le lyrisme exacerbé d’Amado et le goût pour le mouvement qu’il démontre sur son récent Flame Alphabet, et de l’autre la causticité métallique de de Lopes. Évidemment, sur le « Dehumanization Blues » final, leurs échanges évoquent un free jazz et un rock qui ne seraient pas amalgamés mais violemment projetés l’un contre l’autre afin de provoquer une réaction en chaîne ; si cela reste la signature du groupe, la base rythmique conserve son rôle de centre de gravité imposant et indispensable, qui permet toutes les envolées. Les frères González mènent un train d’enfer, poussent leurs acolytes dans des retranchements apparemment sans limites. Ainsi, le groove presque léger de « Two Girls » se durcit de plus en plus jusqu’à imploser dans un bouillonnement furieux où l’on plonge avec gourmandise. Un tel déferlement de vivacité prohibe l’immobilité quoiqu’il arrive. Il ne reste qu’à danser, même de façon désordonnée. Seul compte le mouvement.
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