All sorts of jazz, free jazz and improv. Never for money, always for love.
Après un premier album très remarqué chez Ayler Records, le trio franco-suédois SNUS réitère sa fidélité au label de l'ami Stéphane Berland
pour une exposition nouvelle de leur musique improvisée nerveuse et
pleine de caractère qui place la trompette de Niklas Barnö face à la
fantastique base rythmique composée de deux des plus fascinants
improvisateurs européens, le contrebassiste Joël Grip et le batteur
Didier Lasserre, qu'on a pu déjà apprécier aux côté de Beñat Achiary ou encore Benjamin Duboc, avec qui il a enregistré « En corps » en trio avec Eve Risser, dont nous reparlerons prochainement.
Snus
tire son nom d'un tabac à priser populaire en Suède, et l'on retrouve
dans le propos du trio quelques caractéristiques de ce produit rustique :
un goût fort et prononcé, à la fois sec et piquant, mais aussi lourd et
huileux parfois lorsqu'il devient puissant, dans les dédales
indébrouillables de longues pièces comme « Awakening ». Can't Stop Snusing, s'accuse le trio ; indéniablement, l'abstraction mouvementée de l'album trahit des errements addictifs.
Dès
« Admitting » qui ouvre l'album, le jeu d'embouchure de Barnö
impressionne. Il est certes étendu, mais ne cherche pas la prouesse, et
surtout trouve dans une certaine simplicité l'occasion d'imposer un son
âpre, abrupt qui lézarde le silence de tensions. Barnö semble flotter
au gré du maelström de ses comparses. Autour de lui, les cymbales de
Lasserre sculptent un matériau en fusion, attisé par les claquements
secs de la contrebasse de Grip, corps vivant de bois et de cordes.
Il
y a dans cet album une dramaturgie qui enfle à mesure que les morceaux
progressent. Il faut s'imprégner de la lente progression, jusqu'à
l'éreintement, d'un morceau comme « Deciding » au pivot de l'album... On
pourrait croire, au fil des morceaux que chaque musicien est dans une
bulle au frontières marquées, et que l'enjeu de Can't Stop Snusing est
le tiraillement qui se tresse dans ces lignes mouvantes. Mais au cœur de
ces tensions, on découvre une énergie commune, inéluctable, qui
cartographie avec précision les improvisations de Snus, et qui passe par
le verbe.
Verbes d'action, si possible.
To Snus : néologisme franco-suédois, improviser avec vigueur et rugosité.
Voilà
ce que pourrait être la clé de cet album. En cinq titres comme autant
de verbes (Admettre, Croire, Décider, Abandonner, Eveiller -le plus
beau!-), Barnö, Grip et Lasserre nous livrent le vade-mecum de leur
fonctionnement improvisationnel, tout en l'appliquant énergiquement à la
lettre. Can't Stop Snusing n'est pas qu'une confirmation du talent de
ces trois là. C'est également un disque riche et plein de surprise qui
se consomme sur le long terme.
Ca devient une habitude chez Ayler Records...
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