All sorts of jazz, free jazz and improv. Never for money, always for love.
Il n'y a rien de plus délicieux que
de se faire bousculer par un disque. Pas violenter ou rosser, non... Quelque
chose de moins violent. Une charge qui remue les oreilles, et bien mieux
encore, les certitudes...
C'est le cas de Why Waste Time de Sleeping in Vilna , album paru il y a quelques mois
sur le label Ayler Records de l'ami Stéphane Berland où la voix du
"chanteur de Hip-Hop" (comment le définir plus finement, sans tomber
dans l'explication musigeek ?) Mike Ladd rencontre trois improvisateurs
remarquables, tous aussi iconoclastes que lui.
Rien pourtant, au premier abord, ne laisse imaginer la claque que l'on se prend
quand le morceau "Entropy" démarre... Les brisures de métal du
remarquable guitariste Dave Randall et la poésie politique de Ladd raclent
l'âme à la chaux-vive ; Par instant, on dirait du Rap Métal travaillé à la
clarinette basse de Carol Robinson. Why Waste Time est un disque court, au
format chanson, où l'on entre comme dans une forêt touffue par des chemins à
peine éclairée : la clarinette, les jeux électriques de Randall et le synthé
Vintage de Ladd sur le très beau "Let Nobody" montrent le chemin.
Tout ceci ressemble à une rencontre entre improvisateurs de bonne compagnie, où
la parole est un instrument parmi d'autres. Une atmosphère que l'on retrouve
par exemple sur "Marvelling" qui joue du souffle des voix chuchotées.
C'est en réalité bien plus que ça, Sleeping in Vilna.
Evidemment, on imagine l'atmosphère chaleureuse dans le cottage en bois typique
: les jeux de timbres, de voix, la profusion apportée par le percussioniste
Dirk Rothbrust... Ce dernier vient de l'ensemble contemporain MuzikFabrik. Il
n'a donc aucun mal à trouver toutes sortes de climats, toutes sortes de
couleurs aussi belles que celles de la Baltique.
C'est le cas notamment de "Why Waste Time", qui donne le nom à
l'album et qui s'empare d'un sorte de blues dégingandé où la voix rocailleuse
de Ladd ferait presque songer à un morceau de Tom Waits caressé par les
improvisations.
Et puis l'on se dit bien vite que tout cela ne serait pas suffisant.
Why Waste Time, c'est du Hip-Hop. Cabossé par l'approche des musiciens, rendu
tortueux par l'interprétation... Mais du Hip-Hop.
La clairière au coeur de la forêt où la maison nous invite, a été dessinée à
la bombe à fragmentation. Ce grand espace ne fait pas qu'illuminer l'album, il
abolit toutes sortes de frontières... De celles qui nous empêchait quelques
minutes avant d'imaginer Lauren Newton (avec qui Rothbrust a travaillé) sur un
album de Roots Manuva. Et pourtant, sur un morceau comme "In a Name",
tout devient soudain possible !
On se plonge dans "Past Chaser" et l'on s'enivre du ton acide de Ladd
et des cris de Robinson ; on se surprend du groove bancal et infectieux de
Rothbrust qui aurait pu faire merveille dans les productions de Big Dada
Records. C'est de loin le musicien le plus impressionnant de cet objet étrange,
attachant, précieux qui trouve des continuum inconnus dans le grand déroulement
des mouvements musicaux. Qui trouve aussi des voix nouvelles en unifiant les
musiques de marge.
On en attendait pas moins d'un label comme Ayler Records.
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