Didier Lasserre Trio - Live at l'Atelier Tampon

Antoine Martin, ImproJazz

Foin des clichetons ardomphlesques, contrebasse  « boisée » , et batterie « tellurique » ; les 4 improvisations du trio Sylvain Guérineau, as, Jean Rougier, b, reed flutes, Didier Lasserre,dr, enregistrées à l’Atelier Tampon le 13 mai 2007, sont une musique d’essence et d’esprit libertaires où l’on entend, d’entrée de jeu et tout au long des 66 minutes du concert, que la liberté de l’un commence et s’enrichit là où commence celle des autres.
De l’ « idiome majeur » (Pagier) où il puise - le gisement du free historique -, le jeu du trio n’exclut ni les paroxysmes expressionnistes - Lasserre, Rougier à la flûte dans La Tregua- ni le lyrisme - Guérineau dans Never Know-et la douceur dont le saxophoniste sait bien, avec Marc Aurèle, qu’elle est  invincible . Le public du 14 rue Jules Vallès est tout feu tout flammes,  et j’appuie sur la touche Replay.

Quelques mots sur les titres : Toumaï, «Espoir de vie» en toubou, Arusha, ville de Tanzanie et siège du tribunal pour le génocide du Rwanda, La Tregua, titre de l’autobiographie de Primo Levi, ancrent -Steve Dalachinsky le souligne dans les liner notes- ce live dans l’histoire du XX è siècle. «Tout concert valable se joue en portant son innocence sur un grand champ de mines » pourraient dire aussi les musiciens du trio en paraphrasant (à peine) ce que le vieux surréaliste belge, brigadiste en 1937 sur le front d’Albacete, Achille Chavée, disait de l’écriture du poème. « Mines » :à la fois celles, métaphoriques, du champ de l’écriture automatique et de l’improvisation où l’on se met « en danger », et celles, ignobles, qui mutilent tous les jours des enfants. Dans  Un génocide sur la conscience  (L’Esprit frappeur n° 36, 1998), Michel Sitbon soulignait la responsabilité de la politique française de l’époque dans l’extermination des Tutsi . “ « Dans ces pays-là, un génocide, ça n’est pas trop important », confiait l’homme du 10 mai, toujours aussi plein de « force tranquille ». Mitterrand-la-machette. ” Il faudrait citer tout le livre.