All sorts of jazz, free jazz and improv. Never for money, always for love.
Jean-Marc Foltz aux clarinettes, Matt Turner au violoncelle, Bill Carrother au piano. Chez Ayler Records.
Un album de jazz sous le signe de l’opus 21 de Schönberg et du Pierrot
Lunaire d’Albert Giraud. Les références du jazz deviennent classiques
ce temps-ci. Et elles n’évoquent pas n’importe quel univers puisque
c’est à une oeuvre de la sortie de la tonalité que se réfère le texte
de Jean-Marc Foltz à l’intérieur. La musique n’est pourtant pas
véritablement atonale même si, par son climat, elle semble parfois
suspendue et peut évoquer, à certains moments, la liberté des oeuvres
intermédiaires juste avant que le post romantisme finissant ne bascule
dans une nouvelle liberté. Ce trio un peu étrange fait dialoguer
clarinette, violoncelle et piano. On n’est parfois proche des trios de
Jimmy Giuffre avec Paul Bley et Steve Swallow. Indéniablement dans
l’esprit d’une musique de chambre, mystérieuse et sobre. Un très beau
disque de jazz assez loin du swing.
La référence fréquente des musiciens de jazz à la musique du milieu du
XXe siècle (je pense aussi à Eric Watson) pose certaines questions.
Curieusement le jazz revisite la musique moderne et propose un
“néo-modernisme” parfois un peu nostalgique qu’on retrouve également
chez certains musiciens classiques contemporains. Il faut dire que la
culture musicale et la formation des jazzmen aujourd’hui est souvent
très imprégnée de musique classique. On retrouve peut-être cette
époque bénie de la West-Coast où les ensembles californiens étaient
dirigés par des arrangeurs dont les maîtres étaient Darius Milhaud ou
d’autre musiciens classiques exilés. Cet exil des modernistes dans le
jazz a été totalement incompris par Adorno qui n’y a vu qu’une sorte
de prédation facile. J’entends encore certains classiques parler, à
propos des musiciens de jazz, de “réflexes digitaux”. Aux compositeurs
classiques la conception pensée. Aux musiciens de jazz les simagrées
digitales et la bassesse du simple geste. Un disque comme celui-ci
dément d’un coup un tel partage. La relation de la musique composée
avec l’improvisation peut être à la fois féconde et accessible. Ce
disque en fait la démonstration.
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