The Fish - Live at Olympic Café & Jazz à Mulhouse

Thierry Lepin, Jazzman

Jazz à Mulhouse 2006, soirée de clôture : le public se presse pour célébrer le quartette de Peter Brötzmann et Joe McPhee ; la révélation fut "The Fish". Une claque. Presque une leçon de fraîcheur à leurs aînés qui allaient suivre. Un parie gagné haut la main. Et pourtant... Si le trio se revendique dans l'héritage du free jazz, on est loin d'une quelconque tentation de revival. C'est de multiples points d'ancrages qu'ils se sont nourris (jazz plus mainstream, musiques électro acoustiques, rock'n'roll...) à l'aune de leurs parcours éclectiques (voir Jazzman, décembre 2005). "The Fish" est tout d'abord un son, cinglant, qui prend aux tripes. Celui d'un saxophone alto d'une rare énergie, se déployant par soubresauts, accrocs soudains... vers une forme d'improvisation "à l'arrache", dont la virtuosité agace. Les strates orchestrées par la rythmique explicitent l'enjeu, dans des correspondances charnelles, en variant la profondeur de champ (une tension qui se joue aussi dans les silences). Le trio dessine une chorégraphie sonore presque hypnotique, sans jamais relâcher l'étreinte. Rarement cette formule, pourtant si balisée, a révélé une telle urgence à questionner la matière sonore. Les huits mois de distance qui séparent les deux concerts en témoigne, la musique de "The Fish" est en (r)évolution permanente. Le second offre déjà d'autres pistes (correspondances de textures et de mouvements avec les musiques électroniques) et suggère de futurs ébats plus que prometteurs.