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Jean-Luc Cappozzo & Géraldine Keller - Air Prints

Franpi Barriaux, SunShip

Je savais depuis quelques semaines que ce disque tourne sur ma platine que j'aurai le plus grand mal à chroniquer ce disque, pour deux raisons majeures.

Evacuons déjà la première, qui serait de la fierté mal placée planquée par de la fausse humilité si je n'en parlais pas... Car la pochette d'Air Prints, le disque qui réuni le trompettiste Jean-Luc Cappozzo et la chanteuse et flûtiste Géraldine Keller, nouvelle fournée de l'indispensable Ayler Records, est une photo de moi ; ou plus exactement, une photo des bottes de ma fille dans un jardin d'avril pendant qu'elle s'amuse sur une balançoire.

Un titre, au coeur de l'album, s'appelle d'ailleurs "Sur la balançoire", où la soprano se frotte aux notes tenues de la trompette dans un morceau très court. Il y a dans ce duo comme un plaisir du jeu, d'une improvisation qui embrasse une posture enfantine où le temps est ailleurs, où le moment est privilégié. Où le vent file aux oreilles. Où le plaisir est immédiat.

On ne présente plus Cappozzo, comme ses collaborations avec les plus grands improvisateurs de ces trente dernières années. Géraldine Keller est en revanche une formidable découverte, une de ces musicienne qui peut passer de la musique ancienne ou contemporaine à cette forme absolument libre et sans filets. On peut découvrir ici une collaboration ancienne de la chanteuse et du trompettiste agrémentés des pianistes Sophie Agnel et Christine Wodrascka.

Et puis la seconde raison de ma peur de sécher, ce sont les notes de pochettes de Joël Pagier qui disent tout de ce magnifique Air Prints, avec simplicité et poésie... Comme il le dit, Cappozzo et Keller ont une relation de complicité qui s'apprécie dès la première note du long morceau "Ouvrir les Intermédiaires".

En chantant dans sa flûte, à peine caressée par le growl de la trompette, Keller dessine une aire de jeu commune; il n'y a aucun moment de découverte, il se connaissent et se devinent. Les deux musiciens se lancent à corps perdus dans une exploration commune faite de carresses et de courses folles.

On retrouve le Cappozzo du Soufflé aux Eclisses, attentif et jovial en terrain amical. Des jeux qui parlent de "Chinois à Bicyclette", où l'on retrouve le timbre très puissant du trompettiste.
Oui, ce disque est aérien, léger comme la brise et mutin comme l'alizé. Ce n'est pas seulement le vrombissement de la trompette et le souffle de la flûte qui s'entremêlent, ce n'est pas seulement la voix qui se brise et se confond avec le métal, ce n'est pas seulement les mots qui se jouent de la gorge comme on désarticule un pantin... C'est une liberté insoumise. Voilà tout le sujet du morceau central "Les souffles du temps" et ses chuchotis dans un allemand lascif et surtout de "Air Prints" qui clôt l'album et où Cappozzo emporte la chanteuse dans une mélodie qui convoque une forme de jazz des origines.

Air Prints est comme ces bonbonnes d'air pur en libre service que l'on voit dans les films de science-fiction. Une pause dans le chaos. Indispensable ?

La réponse, mon ami, est soufflée dans le vent...